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JEAN-PAUL II

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 1 septembre 1993

 

 

Les relations des prêtres avec leurs confrères dans le sacerdoce (Mc 6, 7-10)

1. “ La communauté sacerdotale ” ou presbyterium, dont nous avons parlé dans les catéchèses précédentes, comporte, entre ceux qui en font partie, un réseau de relations réciproques qui se situent dans le contexte de la communion ecclésiale produite par le baptême. Le fondement plus spécifique de ces relations est la participation sacramentelle et spirituelle commune au sacerdoce du Christ, d’où dérive un sens spontané d’appartenance au presbyterium.

Le Concile l’a bien remarqué : “ Les prêtres, constitués dans l’ordre du presbytérat par l’Ordination, sont tous unis entre eux par une fraternité sacramentelle intime ; mais d’une façon spéciale ils forment un unique presbyterium dans le diocèse au service duquel ils sont affectés, en dépendance de son évêque ” (Presbyterorum ordinis 8). Par rapport à ce presbyterium diocésain, grâce à la connaissance mutuelle, à la proximité et aux habitudes de vie et de travail, ce sens de l’appartenance se développe davantage, qui suscite et alimente la communion fraternelle et qui l’ouvre dans la collaboration pastorale.

Les liens de la charité pastorale s’expriment dans le ministère et la liturgie, comme le remarque encore le Concile : “ Chaque membre de ce presbyterium est uni aux autres par des liens particuliers de charité apostolique, de ministère et de fraternité : cela se manifeste liturgiquement, depuis l’antiquité, dans la cérémonie où les prêtres qui assistent à l’Ordination sont invités à imposer les mains avec l’évêque qui ordonne sur la tête du nouvel élu, ou encore quand ils célèbrent la sainte Eucharistie dans un même sentiment ” (Ibid.). En ces occasions, on a une représentation de la communion sacramentelle, mais aussi de la communion spirituelle, qui trouve dans la liturgie l’una vox pour proclamer devant Dieu et témoigner devant les frères de l’unité de l’esprit.

2. La fraternité sacerdotale s’exprime aussi dans l’unité du ministère pastoral, dans tout le grand éventail des tâches, des offices et des activités auxquelles les prêtres sont assignés. “ Même quand ils s’emploient à des tâches diverses, ils exercent toujours un unique ministère sacerdotal en faveur des hommes ” (Ibid.).

La diversité des tâches peut être importante. Ainsi par exemple, le ministère dans les paroisses et celui interparoissial ou supra-paroissial, les œuvres diocésaines, nationales, internationales, l’enseignement dans les écoles, la recherche, l’analyse, l’enseignement dans les différents secteurs de la doctrine religieuse et théologique, tout apostolat sous forme de témoignage, avec parfois le fait de cultiver et enseigner quelque branche de ce qui peut être connu par l’homme ; et encore, la diffusion du message évangélique par les médias, l’art religieux dans ses multiples expressions, les nombreux services caritatifs, l’assistance morale aux différentes catégories de chercheurs ou de travailleurs ; et enfin, très actuelles et très importantes aujourd’hui, les activités œcuméniques. Cette variété ne peut pas créer des catégories ou des classes différentes car, pour les prêtres, il s’agit de tâches qui rentrent toujours dans le dessein de l’évangélisation. Nous disons avec le Concile qu’ “ il est évident que tous travaillent pour la même cause, à savoir l’édification du Corps du Christ, qui exige des fonctions multiples et des adaptations nouvelles, surtout de notre temps ” (Ibid.).

3. C’est la raison pour laquelle il est important que chaque prêtre soit disposé – et convenablement formé – à comprendre et à estimer l’œuvre accomplie par ses frères dans le sacerdoce. C’est une question d’esprit chrétien et ecclésial, au-delà de l’ouverture aux signes des temps. Il devra être capable de comprendre, par exemple, qu’il y a une diversité de besoins pour l’édification de la communauté chrétienne, comme il y a une diversité de charismes et de dons ; il y a encore diversité dans les manières de concevoir et d’accomplir les œuvres apostoliques, puisque dans le domaine pastoral de nouvelles méthodes de travail peuvent être proposées et employées, tout en demeurant toujours dans le cadre de la communion de foi et d’action de l’Église.

La compréhension réciproque est la base de l’aide mutuelle dans les différents domaines. Répétons-le avec le Concile : “ Il est très nécessaire que tous les prêtres, diocésains aussi bien que religieux, s’aident réciproquement, de manière à être toujours des coopérateurs de la vérité ” (Ibid.). On peut s’aider réciproquement de différentes manières : cela va de la disponibilité à rendre service à un confrère dans le besoin au fait d’accepter de programmer le travail dans un esprit de coopération pastorale qui s’avère toujours plus nécessaire entre les différents organismes et groupes, y compris dans l’organisation globale de l’apostolat. À ce sujet, on gardera à l’esprit que la paroisse elle-même (comme parfois aussi le diocèse), tout en ayant son autonomie, ne peut être une île, en particulier à une époque comme la nôtre où abondent les moyens de communication, la mobilité des personnes, l’afflux en certains points d’attraction, et les nouvelles homologations de tendances, d’habitudes, de modes et d’horaires. Les paroisses sont des organes vivants de l’unique Corps du Christ, de l’unique Église, dans lesquels on accueille et on sert tant les membres de la communauté locale que tous ceux qui, pour une raison ou une autre, affluent à un moment donné, lequel peut représenter l’émergence de Dieu dans une conscience ou dans une vie. Naturellement, cela ne doit pas devenir une cause de désordre, ni d’irrégularités envers les lois canoniques, qui sont elles aussi au service de la pastorale.

4. Il faut souhaiter et favoriser un effort particulier de compréhension mutuelle et d’aide réciproque spécialement dans les rapports entre les prêtres plus âgés et les plus jeunes : les uns comme les autres sont tellement nécessaires à la communauté chrétienne, et tellement chers aux évêques et au Pape. C’est le Concile lui-même qui recommande aux anciens d’avoir de la compréhension et de la sympathie pour les initiatives des jeunes ; et aux jeunes de respecter l’expérience des anciens et de leur faire confiance ; aux uns et aux autres de se traiter avec une affection sincère, selon l’exemple donné par tant de prêtres d’hier et d’aujourd’hui (cf. Ibid.).

Que de choses monteraient du cœur aux lèvres, sur ces questions dans lesquelles se manifeste concrètement la “ communion sacerdotale ” qui relie les prêtres ! Nous nous contenterons de faire référence à celles suggérées par le Concile : “ Animés d’un esprit fraternel, que les prêtres ne négligent pas l’hospitalité (cf. He 13, 1-2), qu’ils pratiquent la bienfaisance et la communauté de biens (cf. He 13, 16), en ayant spécialement soin de ceux qui sont malades, affligés, surchargés de travail, isolés ou exilés, ainsi que de ceux qui sont persécutés (cf. Mt 5, 10) ” (Ibid.).

Tout pasteur, tout prêtre, quand il jette un regard sur sa vie passée, la trouve parsemée d’expériences du besoin de compréhension, d’aide, de coopération de la part de tant de confrères comme d’autres fidèles, que l’on retrouve sous les différentes formes de besoins à peine évoquées ; et de combien d’autres ! Qui sait s’il n’aurait pas été possible de faire davantage pour tous ces “ pauvres ”, aimés par le Seigneur et confiés par lui à la charité de l’Église ? Pour ceux également qui, comme nous le rappelle le Concile (Ibid.), pouvaient être dans une période de crise. Même en ayant conscience d’avoir suivi la voix du Seigneur et de l’Évangile, nous devons nous proposer chaque jour de faire toujours davantage et toujours mieux pour tous.

5. Le Concile suggère également quelque initiative communautaire, afin de promouvoir l’aide réciproque en cas de besoin, et aussi de manière permanente et presque institutionnelle en faveur des confrères.

Il se réfère avant tout à des réunions fraternelles périodiques dans un but de détente et de repos, pour répondre à ce besoin humain de reprendre des forces physiques, psychiques et spirituelles ; le “ Seigneur et Maître ” Jésus, dans sa délicate attention à la situation des autres, en avait déjà tenu compte quand il avait invité les Apôtres : “ Venez vous-mêmes à l’écart dans un lieu désert, et reposez-vous un peu ! ” (Mc 6, 31). Cette invitation vaut également pour les prêtres à toute époque, et dans la nôtre plus que jamais, étant donné le harcèlement des occupations et leur complexité, y compris dans le ministère pastoral (cf. PO 8).

Le Concile encourage ensuite les initiatives qui visent à rendre possible et facile de façon permanente la vie commune des prêtre, même sous forme de cohabitation sagement instituée et ordonnée, ou au moins sous forme d’une communauté de table facilement accessible et praticable dans des lieux adaptés. Les raisons non seulement économiques et pratiques, mais aussi spirituelles, de ces initiatives, en harmonie avec les institutions de la première communauté de Jérusalem (cf. Ac 2, 46-47), sont évidentes et pressantes dans la situation actuelle de nombreux prêtres et prélats auxquels il faut porter attention et soin afin de soulager leurs difficultés et leurs peines (cf. PO, 8).

“ Il faut aussi avoir une grande considération et encourager avec diligence les associations qui, sur la base de statuts reconnus par l’autorité ecclésiastique compétente, par un mode de vie convenablement ordonné et approuvé et par l’aide fraternelle, favorisent la sainteté des prêtres dans l’exercice du ministère et visent de ce fait à servir l’Ordre des prêtres tout entier ” (Ibid.).

6. Cette dernière expérience, en de nombreux endroits, a été faite par de saints prêtres y compris dans le passé. Le Concile désire que cette expérience prenne la plus grande extension possible et il stimule en ce sens, et de nouvelles institutions n’ont pas manqué d’apparaître, dont le clergé et le peuple chrétien tirent un grand bénéfice. Leur floraison et leur efficacité sont proportionnelles à l’accomplissement des conditions fixées par le Concile, à savoir : la finalité de la sanctification sacerdotale, l’aide fraternelle entre les prêtres, la communion avec l’autorité ecclésiastique, au niveau diocésain ou à celui du Siège apostolique, selon les cas. Cette communion comprend des statuts approuvés comme règle de vie et de travail, sans lesquels les associés seraient presque inévitablement condamnés au désordre ou aux impositions arbitraires de quelque personnalité plus forte. C’est un vieux problème qui se pose à toute forme d’association et que l’on retrouve dans le domaine religieux et ecclésiastique. L’autorité de l’Église réalise sa mission de service en faveur des prêtres et de tous les fidèles en exerçant aussi cette fonction de discernement des valeurs authentiques, de protection de la liberté spirituelle des personnes et de garantie de la validité des associations, ainsi que de toute la vie de la communauté

Là aussi, il s’agit de mettre en pratique le saint idéal de la “ communion sacerdotale ”.

 

 



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