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JEAN-PAUL II 

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 7 avril 1999

L'amour exigeant du Père 

   

Lecture: Mt 7, 21-23 

1. L'amour de Dieu le Père pour nous ne peut pas nous laisser indifférents, il demande même à être partagé à travers un engagement constant d'amour. Cet engagement revêt des significations toujours plus profondes à mesure que nous nous approchons davantage de Jésus, qui vit pleinement en communion avec le Père, devenant un modèle pour nous. 

Dans le contexte culturel de l'Ancien Testament, l'autorité du Père est absolue, elle est utilisée comme terme de comparaison pour décrire l'autorité du Dieu créateur, à qui il n'est pas licite d'adresser des contestations. On peut lire chez Isaïe: «Malheur à qui dit à un père: "Pourquoi engendres-tu?" et à une femme: "Pourquoi mets-tu au monde?"; Ainsi parle Yahvé, le Saint d'Israël, son créateur: On me demande des signes au sujet de mes enfants, au sujet de l'œuvre de mes mains, on me donne des ordres» (Is 45, 10sq). Un père a également la tâche de guider son fils, en le reprenant avec sévérité si cela est nécessaire. Le Livre des Proverbes rappelle que cela est également valable pour Dieu: «Yahvé reprend celui qu'il aime, comme un père le fils qu'il chérit» (Pr 3, 12; cf. Ps 103, 13). Pour sa part, le prophète Malachie atteste l'affection pleine de compassion de Dieu à l'égard de ses enfants (Ml 3, 17), mais il s'agit toujours d'un amour exigeant: «Rappelez-vous la Loi de Moïse, mon serviteur à qui j'ai prescrit, à l'Horeb, pour tout Israël, des lois et des coutumes» (Ml 3, 22). 

2. La Loi que Dieu donne à son peuple n'est pas un poids imposé par un patron tyrannique, mais l'expression de cet amour paternel qui indique le juste sentier de la conduite humaine et la condition pour hériter des promesses divines. Tel est le sens de l'injonc- tion du Deutéronome: «Garde les commandements de Yahvé ton Dieu pour marcher dans ses voies et pour le craindre. Mais Yahvé ton Dieu te conduit vers un heureux pays» (Dt 8, 5-7). Dans la mesure où elle ratifie l'alliance entre Dieu et les fils d'Israël, la loi est dictée par l'amour. Mais la transgresser n'est pas sans conséquences, et comporte des résultats douloureux, qui sont toutefois toujours dominés par la logique de l'amour, car ils obligent l'homme à prendre une conscience salutaire d'une dimension constitutive de son être. «C'est en découvrant la grandeur de l'amour de Dieu que notre cœur est ébranlé par l'horreur et le poids du péché et qu'il commence à craindre d'offenser Dieu par le péché et d'être séparé de Lui» (Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1432). 

S'il se détache du Créateur, l'homme tombe nécessairement dans le mal, dans la mort et dans le néant. En revanche, l'adhésion à Dieu est source de vie et de bénédiction. C'est ce que souligne le même Livre du Deutéronome: «Vois, je te propose aujourd'hui vie et bonheur, mort et malheur. Si tu écoutes les commandements de Yahvé ton Dieu que je te prescrits aujourd'hui, et que tu aimes Yahvé ton Dieu, que tu marches dans ses voies, que tu gardes ses commandements, ses lois et ses coutumes, tu vivras et tu multiplieras, Yahvé ton Dieu te bénira dans le pays où tu entres pour en prendre possession» (Dt 30, 15, sq). 

3. Jésus n'abolit pas la Loi dans ses valeurs fondamentales, mais il la perfectionne, comme il le dit lui-même dans le discours de la montagne: «N'allez pas croire que je suis venu abolir la Loi ou les Prophètes; je ne suis pas venu abolir, mais accomplir» (Mt 5, 17). 

Jésus indique le cœur de la Loi dans le précepte de l'amour, et il en développe les exigences radicales. Amplifiant le précepte de l'Ancien Testament, il commande d'aimer ses amis et ses enne- mis, et il explique cette extension du précepte en faisant référence à la paternité de Dieu: «Afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes» (Mt 5, 43-45; cf. CEC, n. 2784). 

Avec Jésus, un saut de qualité est accompli: il résume la Loi et les Prophètes en une seule norme, aussi simple dans sa formulation que difficile dans sa réalisation: «Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faîtes-le vous-mêmes pour eux» (cf. Mt 7, 12). Cette voie est même présentée comme celle à parcourir pour être parfaits comme le Père céleste (cf. Mt 5, 48). Celui qui agit ainsi rend témoignage aux hommes pour que soit glorifié le Père qui est dans les cieux (cf. Mt 5, 16), et il se prépare à recevoir le Royaume qu'Il a préparé pour les justes, selon les paroles du Christ dans le jugement dernier: «Venez, les bénis de mon Père, re- cevez en héritage le Royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde» (Mt 25, 34). 

4. Alors qu'il annonce l'amour du Père, Jésus ne manque jamais de rappeler qu'il s'agit d'un amour exigeant. Cette caractéristique du visage de Dieu apparaît dans toute la vie de Jésus. Sa «nourriture» est précisément d'accomplir la volonté de celui qui l'a envoyé (cf. Jn 4, 34). Son jugement est juste, précisément parce qu'il ne cherche pas sa propre volonté, mais la volonté du Père qui l'a envoyé dans le monde (cf. Jn 5, 30). C'est pourquoi, le Père lui rend témoignage (cf. Jn 5, 37) ainsi que les Ecritures (cf. Jn 5, 39). Ce sont surtout les œuvres qu'il accomplit au nom du Père qui garantissent qu'il est envoyé par lui (cf. Jn 5, 36; 10, 25.37-38). Parmi celles-ci, la plus élevée est celle d'offrir sa propre vie, comme le Père le lui a commandé: ce don de soi est d'ailleurs la raison pour laquelle le Père l'aime (cf. Jn 10, 17-18) et est le signe qu'il aime le Père (cf. Jn 14, 31). Si la loi du Deutéronome était déjà un chemin et une garantie de vie, la loi du Nouveau Testament l'est de façon inédite et paradoxale, s'exprimant dans le commandement d'aimer ses frères, jus- qu'à donner sa vie pour eux (cf. Jn 15, 12-13). 

Le «commandement nouveau» de l'amour, comme le rappelle saint Jean Chrysostome, trouve sa raison ultime dans l'amour divin: «Vous ne pouvez pas invoquer votre Père le Dieu de toute bonté, si vous conservez un cœur cruel et inhumain; dans ce cas, en effet, vous ne possédez plus en vous l'empreinte de la bonté du Père céleste» (Hom. in illud «Angusta est porta»: PG 51, 44B). Dans cette perspective se trouvent à la fois la continuité et le dépassement: la Loi se transforme et s'approfondit comme Loi de l'amour, l'unique qui convient au visage paternel de Dieu. 

                                                                       * * *

Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 7 avril 1999, se trouvaient les groupes suivants auxquels le Saint-Père s'est adressé en français: 

De France: Pèlerinage diocésain de Tulle; pèlerins d'Alsace; pèlerins bre- tons du diocèse de Vannes; pèlerins du diocèse d'Autun; pèlerins de Lugny et de Brive; paroisse de Les Breuleux; pa- roisse Notre-Dame-du-Port; Ecole Saint- Vincent-de-Paul, de Nice; Collège Les Maristes, de Bourg-de-Péage; Collège Saint-Dominique, de Châlon-sur-Saône; Collège Saint-Joseph, de Lorient; Collège Chabot, de Le-Boire-sur-Vie; jeunes des aumôneries du diocèse de Dijon; Lycée Saint-Louis, de Bar-Le-Duc. 

De Suisse: Groupe de pèlerins de Fribourg. 

De Belgique: Groupe de pèlerins; jeunes de Molenbeck. 

Du Canada: groupe de pèlerins du Québec. 

 

Chers Frères et Sœurs,

L'amour de Dieu le Père ne peut nous laisser indifférents. Il réclame de notre part un continuel engagement de charité, qui nous rend proches de Jésus, modèle de charité. Dans l'Ancien Testament déjà, la loi de Dieu est l'expression de son amour paternel. Elle indique le juste chemin pour hériter des promesses divines. Se détacher du Créateur conduit l'homme au mal, à la mort, au néant, alors qu'adhérer à sa loi est source de vie et de bénédictions.

Jésus n'abolit pas la loi dans ses valeurs fondamentales, mais il la porte à son accomplissement. Il indique que le cœur de la loi se trouve dans le commandement de l'amour et il en développe les exigences radicales. C'est la voie à parcourir pour être parfait comme le Père céleste. Celui qui agit ainsi glorifie Dieu et lui rend témoignage, se préparant à recevoir le Royaume préparé pour les justes. Par toute sa vie, Jésus nous rappelle que l'amour pour le Père s'exprime dans l'amour des frères, jusqu'à donner sa vie pour eux.

 

J'accueille avec plaisir les francophones. Je salue les pèlerins du diocèse de Tulle, venus avec leur Evêque, Mgr Le Gal, ceux d'Alsace et de Bretagne ainsi que les nombreux jeunes, notamment ceux de Molenbeck, venus approfondir le dialogue islamo-chrétien, et ceux du collège Les Maristes de Bourg-de-Péage, dont je me prépare à canoniser le fondateur, Marcellin Champagnat. Que le Seigneur Ressuscité soit pour chacun joie et lumière sur la route ! A tous je donne de grand cœur la Bénédiction apostolique.

  



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