Index   Back Top Print

[ DE  - EN  - ES  - FR  - IT  - PT ]

JEAN-PAUL II

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 25 Octobre 2000
 

 

Lecture:  Jn 6, 48-51

1. "Dans la liturgie terrestre, nous participons par un avant-goût à cette liturgie céleste" (Sacrosanctum concilium, n. 8; Gaudium et spes, n. 38). Ces mots si clairs et essentiels du Concile Vatican II nous présentent une dimen-sion fondamentale de l'Eucharistie:  le fait qu'elle soit "futurae gloriae pignus", gage de la gloire future, selon une belle expression de la tradition chrétienne (cf. SC, n. 47). "Ce sacrement - observe saint Thomas d'Aquin - ne nous introduit pas immédiatement dans la gloire, mais nous donne la force de parvenir à la gloire et c'est pour cette raison qu'il est appelé "viatique"" (Summa Th. III, 79, 2 ad I). La communion avec le Christ que nous vivons à présent, alors que nous sommes des pèlerins et des voyageurs sur les routes de l'histoire, anticipe la rencontre suprême du jour où "nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est" (1 Jn 3, 2). Elie, qui lors de sa marche dans le désert s'effondre privé de forces sous un genévrier et qui est ranimé par un pain mystérieux jusqu'à atteindre le sommet de la rencontre avec Dieu (cf. 1 R 19, 1-8), est un symbole traditionnel de l'itinéraire des fidèles, qui trouvent dans le pain eucharistique la force pour marcher vers le but lumineux de la ville sainte.

2. Tel est également le sens profond de la manne préparée par Dieu dans le désert du Sinaï, "nourriture des anges" capable de procurer toutes sortes de délices, et de satisfaire tous les goûts, manifestation de la douceur de Dieu envers ses fils (cf. Sg 16, 20-21). Ce sera le Christ lui-même qui fera apparaître cette signification spirituelle de l'épisode de l'Exode. C'est lui qui nous fait goûter dans l'Eucharistie la double saveur de nourriture du pèlerin et de nourriture de la plénitude messianique dans l'éternité (cf. Is 25, 6). Pour emprunter une expression consacrée à la liturgie du sabbat hébraïque, l'Eucharistie est un "avant-goût de l'éternité dans le temps" (A. J. Heschel). Comme le Christ a vécu dans la chair tout en demeurant dans la gloire de Fils de Dieu, de même, l'Eucharistie est une présence divine et transcendante, communion avec l'éternel, signe de la "compénétration de la cité terrestre et de la cité céleste" (GS, n. 40). L'Eucharistie, mémorial de la Pâque du Christ, est de par sa nature porteuse de l'éternité et de l'infini de l'histoire humaine.

3. Cet aspect qui ouvre l'Eucharistie à l'avenir de Dieu, tout en la laissant ancrée dans la réalité présente, est illustré par les paroles que Jésus prononce à propos de la coupe de vin, au cours de la dernière Cène (cf. Lc 22, 20; 1 Co 11, 25). Marc et Matthieu évoquent dans ces mêmes paroles l'alliance dans le sang des sacrifices du Sinaï (cf. Mc 14, 24; Mt 26, 28; Ex 24, 8). Luc et Paul, en revanche, révèlent l'accomplissement de la "nouvelle alliance" annoncée par le prophète Jérémie:  "Voici venir des jours - oracle de Yahvé - ou je conclurai avec la maison d'Israël (et la maison de Juda) une alliance nouvelle. Non pas comme l'alliance que j'ai conclue avec leurs pères" (31, 31-32). En effet, Jésus déclare:  "Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang". Le terme "nouveau", dans le langage biblique, indique d'habitude le progrès, la perfection définitive.

Ce sont encore Luc et Paul qui soulignent que l'Eucharistie est l'anticipation de l'horizon de lumière glorieuse propre au règne de Dieu. Avant la Dernière Cène, Jésus déclare:  "J'ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir; car je vous le dis:  jamais plus je ne la mangerai jusqu'à ce qu'elle s'accomplisse dans le Royaume de Dieu. Puis, ayant reçu une coupe, il rendit grâce et dit:  "Prenez ceci et partagez entre vous; car je vous le dis, je ne boirai plus désormais du produit de la vigne jusqu'à ce que le Royaume de Dieu soit venu"" (Lc 22, 15-18). Paul rappelle lui-aussi explicitement que la cène eucharistique est orientée vers la dernière venue du Seigneur:  "Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne" (1 Co 11, 26).

4. Le quatrième évangéliste, Jean, exalte cette orientation de l'Eucharistie vers la plénitude du Royaume de Dieu dans le célèbre discours sur le "pain de vie" que Jésus tient dans la synagogue de Capharnaüm. Le symbole qu'il a pris comme point de référence biblique est, comme on l'a déjà mentionné, celui de la manne offerte par Dieu à Israël en pèlerinage dans le désert. A propos de l'Eucharistie, Jésus affirme solennellement:  "Qui mangera ce pain vivra à jamais [...] Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour [...] Voici le pain descendu du ciel; il n'est pas comme celui qu'ont mangé les pères et ils sont morts; qui mange ce pain vivra à jamais" (Jn 6, 51.54.58). La "vie éternelle", dans le langage du quatrième  Evangile, est la vie divine elle-même, qui dépasse les frontières du temps. L'Eucharistie, étant communion avec le Christ, est donc participation à la vie de Dieu qui est éternelle et qui vainc la mort. C'est pourquoi Jésus déclare:  "Or c'est la volonté de celui qui m'a envoyé que je ne perde rien de tout ce qu'il m'a donné mais que je ressuscite au dernier jour. Oui, telle est la volonté de mon Père, que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle" (Jn 6, 39-40).

5. Sous cette lumière - comme le disait de façon suggestive un théologien russe, Sergej Bulgakov - "La liturgie est le ciel sur la terre". C'est pourquoi, dans la Lettre apostolique Dies Domini, en reprenant les paroles de Paul VI, j'ai exhorté les chrétiens à ne pas négliger "cette rencontre, ce banquet que le Christ nous prépare dans son amour. Que la participation y soit à la fois très digne et festive! C'est le Christ, crucifié et glorifié, qui passe au milieu de ses disciples, pour les entraîner ensemble dans le renouveau de sa résurrection. C'est le sommet, ici-bas, de l'Alliance d'amour entre Dieu et son peuple:  signe et source de joie chrétienne, relais pour la fête éternelle" (n. 58; cf. Gaudete in Domino, conclusion).

* * *


Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 25 octobre 2000, se trouvaient les groupes suivants auxquels le Saint-Père s'est adressé en français: 

De divers pays:  Groupe de Frères maristes; Fédération internationale de Bobsleigh et de Tobogganing.

De France:  Groupes de pèlerins des diocèses d'Annecy; de Luçon, de Paris; Paroisse de Pourrières; Etoile Notre-Dame, de Mayenne; Collège Sainte-Marie de la Providence, de Rochefort; Association "France-Italie"; Association "La Renaissance de Saint-Pierre", de La Martinique.

De Suisse:  Harmonie "La Concordia", de Fribourg; Jeunes des paroisses de La Gruyère.

Du Canada:  Groupe de pèlerins.

Chers Frères et Sœurs,   

En ces temps où nous sommes des pèlerins sur les routes de l'histoire, la communion avec le Christ que nous vivons dans l'Eucharistie anticipe la rencontre que nous aurons avec lui lorsque "nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est" (1 Jn 3, 2). Dans le pain eucharistique nous trouvons la force pour marcher vers ce but lumineux.  

L'Eucharistie est donc la nourriture de la route et la nourriture de la plénitude messianique dans l'éternité. Elle est présence divine et transcendante, communion avec l'éternel, signe de la "compénétration de la cité terrestre et de la cité céleste" (GS, n. 40). L'Eucharistie, mémorial de la Pâque du Christ, introduit de l'éternité et de l'infini dans l'histoire humaine. Elle est tournée vers l'ultime venue du Seigneur et tendue vers la plénitude du règne de Dieu. Communion au Christ, l'Eucharistie est donc participation à la vie de Dieu qui est éternelle et qui triomphe de la mort. Ainsi, on peut dire avec le théologien russe Sergej Bulgakov : "La liturgie est le ciel sur la terre". 

Je suis heureux d'accueillir les pèlerins francophones présents ce matin. Je salue en particulier les Frères maristes, les membres de l'Association France-Italie ainsi que les personnes âgées de La Martinique. Je souhaite que votre pèlerinage jubilaire vous aide à grandir dans la connaissance du Christ et à vivre dans la fidélité à son Evangile. A tous je donne de grand cœur la Bénédiction apostolique.

© Copyright 2000 - Libreria Editrice Vaticana

 



Copyright © Dicastero per la Comunicazione - Libreria Editrice Vaticana