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 Message à la première Conférence des Nations Unies
sur l’exploration et l’utilisation pacifique
de l’espace extra-atmosphérique (Vienne)*

 

Au moment où, pour la première fois dans l’histoire du monde, se réunît une Conférence internationale sur l’exploration et l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique, Nous saluons avec émotion les Délégués hautement qualifiés de toutes les Nations participantes. Nous désirons leur présenter Nos vœux au seuil de leurs travaux, et les assurer du profond intérêt avec lequel l’Eglise Catholique en suivra le déroulement.

Avec l’exploration et l’utilisation de l’espace, on peut dire que la vie humaine acquiert, en quelque sorte, une nouvelle dimension. Grâce aux satellites artificiels, qui iront probablement en se multi¬pliant et en se perfectionnant toujours plus, ce sont des possibilités jusqu’ici insoupçonnées qui sont désormais ouvertes aux hommes et aux peuples pour la transmission de connaissances et d’informations dans tous les domaines; c’est une voie nouvelle qui s’ouvre et qui peut se révéler prodigieusement rapide et efficace pour les progrès de l’éducation, des échanges culturels, de l’assistance internationale; c’est peut-être - Dieu le veuille! - l’annonce de l’abaissement prochain des barrières qui empêchent encore les rapports pacifiques entre certains groupes sociaux et nationaux, le signe avant-coureur d’une ère de coopération sincère entre toutes les nations du globe, un tournant - qui pourrait être décisif - dans la marche tourmentée de l’humanité vers l’unité et vers la paix.

Si l’Eglise n’a pas compétence pour se prononcer sur les aspects techniques et scientifiques de l’exploration de l’espace, elle est directement intéressée en revanche par les conséquences éducatives, culturelles, morales et sociales, qui vont s’écouler de cet agrandisse¬ment soudain du champ de l’activité humaine. Elle est soucieuse que les gigantesques progrès de la technique spatiale, auxquels le monde assiste avec admiration depuis quelques années, soient mis au service de la paix et du bien commun de l’humanité. Et elle estime pouvoir, par le rappel opportun des principes d’ordre moral et spirituel si souvent proclamés par les Souverains Pontifes en ces dernières années, apporter, en ce domaine aussi, une utile contribu¬tion au véritable bien de la société.

Il est évident en effet, pour tout observateur impartial, que l’oubli ou la transgression des règles morales entraînerait ici des conséquences particulièrement graves. Si par exemple les bienfaits de l’utilisation de l’espace devaient, au détriment de la justice, ne profiter qu’à un certain groupe de nations, à l’exclusion des autres; si la libre circulation des informations venait à entraîner aussi et sans contrôle la propagation de fausses nouvelles; si les facilités ac¬crues de transmission devenaient un instrument pour les propagandes idéologiques, tendant à répandre la subversion, à exciter la haine, à entretenir les discriminations raciales, à opposer les peuples ou les classes sociales au lieu de les unir: qui ne voit que les récentes et merveilleuses découvertes de la science se retourneraient alors contre l’homme et travailleraient à son malheur et non à son bonheur?

On l’a souvent remarqué: les progrès d’ordre scientifique et technique ne sont pas toujours suivis de progrès comparables dans les domaines de la morale, du droit et de la coopération internationale. Des efforts remarquables ont pourtant été déjà entrepris, auxquels Nous avons à cœur de rendre hommage. Un Traité a été conclu l’an dernier, pour définir les principes qui doivent régir les activités des Etats en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace. C’est un premier pas, auquel le Saint-Siège a donné son appui et dont l’Eglise se félicite. Mais celle-ci, sans sortir des limites de sa mission, croit pouvoir attirer l’attention des responsables sur l’urgence de progresser dans cette voie. Il faut que s’élabore sans tarder tout un « droit spatial », qui coordonne et discipline les initiatives en ces matières; il faut que d’éventuelles prochaines conquêtes de la science - et la science progresse rapidement - trouvent déjà en place l’armature juridique et les aménagements institutionnels garantissant qu’elles seront mises au service du bien commun et protégées contre des exploitations abusives.

A ce prix l’ère spatiale avancera dans l’ordre et non dans la confusions et la rivalité. A ce prix elle sera bénéfique pour tous les peuples et non pour quelques privilégiés. Nous pensons en particulier à ceux que leur moindre développement culturel et économique a maintenus jusqu’ici dans un pénible et injuste état d’infériorité, et qui voient maintenant s’ouvrir devant eux des possibilités d’avance rapide dans les voies du progrès éducatif et culturel. Utiliser en leur faveur les ressources offertes par l’exploration de l’espace extra-atmosphérique, ce sera travailler à la fois pour la promotion de l’homme, pour la justice et pour la paix.

Tels sont les voeux et les recommandations que Nous osons formuler au moment ou va s ouvrir la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et l’utilisation pacifique de l’espace. De grand coeur Nous invoquons sur ses organisateurs et sur tous ceux qui participeront à ses travaux les plus abondantes faveurs divines.

Du Vatican, le 6 août 1968.


*AAS 60 (1968), p.570-572.

Insegnamenti di Paolo VI, vol. VI p.330-332.

L’Osservatore Romano, 18.8.1968, p.2.

L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française, n. 34 p.8.

La Documentation catholique, n.1525 col.1652-1654.

 



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