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DISCOURS DU PAPE PAUL VI
AUX PARTICIPANTS AU 74ème CONGRÈS NATIONAL
DE L’UNION DES Œ UVRES CATHOLIQUES DE FRANCE

Mercredi 14 avril 1971

 

Chers Fils et chères Filles,

Consacré à l’enfant, aux enfants d’aujourd’hui, votre soixante- quatorzième Congrès national de l’Union des Œ uvres Catholiques de France, réuni sous la présidence de Monseigneur Vial, revêt une importance particulière. D’aussi près qu’il Nous était possible, Nous en avons suivi la préparation. Une enquête serrée et l’utilisation des meilleures acquisitions de la psychologie et des sciences humaines vous ont permis, en réunion générale comme en carrefour, d’élargir votre vision. Prêtres, religieuses et laïcs, vous avez regardé vivre les enfants, entre eux, avec les adultes, au sein de leur milieu social et culturel devenu mobile. Vous avez analysé leurs comportements et leurs relations affectives, déchiffré leur langage propre, mieux perçu leurs aspirations. Pourquoi tout ce travail, sinon pour reconnaître, pour redonner toute leur place à ces enfants dans la société et dans l'Eglise?

Car c’est un fait: en dépit des apparences, trop souvent, l’enfant n’est pas considéré en lui-même, avec ses possibilités propres et la grâce de Dieu qui l’anime. Bien plus, il risque d’être vu par les uns ou les autres comme un obstacle à un bonheur égoïste des grandes personnes, ou d’être au contraire utilisé comme un objet. Qui dira le drame de l’enfance humiliée, bafouée dans la droiture de son coeur et le dynamisme de son être, menacée dans son équilibre de vie et son épanouissement humain et chrétien?

Puissions-nous au contraire accueillir toujours l’enfant comme un privilégié de Dieu béni avec prédilection par le Seigneur Jésus (Cfr. Marc. 10, 16) apte à recevoir mieux que les habiles et les savants les secrets du Père (Cfr. Luc. 10, 21), prêt à entrer de plain-pied dans le Royaume des cieux! (Cfr. Matth. 19, 14) Que de fois, dans la Bible comme dans l’histoire de l’Eglise, Dieu a suscité des enfants pour rappeler ou réaliser ses desseins! Et l’Eglise a jugé l’enfant de sept ans assez responsable pour demander de lui-même le baptême, et accéder aux sacrements de Pénitence, d’Eucharistie et de Confirmation. Oui, il nous faut regarder et écouter ces enfants; leur permettre d’exprimer toutes leurs richesses dans un climat empreint de respect affectueux et attentif. Car l’enfant lui aussi, avec son intelligence, sa sensibilité et sa liberté, subit l’attirance du bien et du mal et est capable de choisir, de se dévouer, de se sacrifier, d’être généreux et fidèle.

C’est dire l’importance de l’apport positif de l’éducateur. Attentif à découvrir le «langage», et à enregistrer les réactions de l’enfant, il sait aussi que celui-ci a besoin, aujourd’hui comme hier, d’être formé tout au long de sa croissance. S’il doit déployer sa spontanéité dans un univers à sa mesure, sans quoi l’éducation reçue risquerait d’être étrangère à l’élan de sa personnalité, il réclame tout autant d’être soutenu par un cadre extérieur, par un ordre ferme de valeurs, par une autorité qui ne démissionne pas, précisément parce que le jeu de sa liberté requiert cette sécurité.

A plus forte raison quand il s’agit de la Révélation, on ne saurait dire que les données de la foi soient précontenues dans la conscience de l’enfant. Certes, il est préparé à les accueillir comme un don du Père, surtout s’il a eu le bonheur de recevoir dès sa naissance, avec le baptême, le germe de la foi. On ne le dira jamais assez, l’Esprit de Dieu est à l’œuvre en lui. Dieu seul peut d’ailleurs apprécier son degré de foi. Mais la doctrine chrétienne doit lui être présentée dans toute sa précision et toutes ses exigences, à la mesure de son esprit, à travers le langage évocateur de la Bible et de la liturgie, avant d’être vécue et exprimée dans ses «activités» catéchétiques et dans une action chrétienne et un apostolat à sa taille. N’est-ce pas là aussi un de ces droits primordiaux de l’enfant qui sont si chers à la conscience moderne?

Dès lors, comment passer sous silence tous ceux qui, par leur affection, par leur témoignage, par l’atmosphère qu’ils créent, par leur enseignement, assument la charge merveilleuse et redoutable de satisfaire ce droit: parents, éducateurs scolaires, animateurs de loisirs, catéchètes, responsables et aumôniers de mouvements, ministres des sacrements? Cet environnement, pour être humain, devra porter l’enfant à l’accueil, au partage, au don. Et pour être chrétien, il devra lui fournir aussi les signes explicites de la foi: le respect du sacré, la prière, la charité, et la chaude fraternité du foyer familial, scolaire et paroissial.

Vous le savez, avec tous les psychologues; dès son premier âge, l’enfant est déjà marqué profondément et souvent définitivement, par son «environnement». L’équilibre du foyer et le bonheur qui y règne, l’affection et le dévouement mutuels, ainsi que le climat religieux de la vie quotidienne sont des éléments irremplaçables dont l’empreinte s’avère capitale sur l’enfant. Aussi est-ce avec joie que Nous saluons les parents chrétiens qui éveillent leur tout petit au sens de Dieu. Avec quelle tristesse, devons-nous ajouter, Nous pensons aux autres enfants pour qui Dieu demeure inconnu jusqu’à l’âge tardif du catéchisme didactique. Et que dire, hélas, de ceux à qui l’on taira toujours les réalités spirituelles sans lesquelles il ne peut y avoir de vie pleinement humaine? Aussi félicitons-Nous tous les pasteurs qui intensifient aujourd’hui cette prise de conscience et ce souci auprès des parents. Ceux-ci ne demeurent-ils pas pour leurs enfants les éducateurs premiers et privilégiés?

En ce centenaire des Congrès de l’Union des Œ uvres, puissent l’audace et la fidélité apostolique de tant de pionniers - particulièrement Monseigneur de Ségur, le Père Anizan et le Père Courtois - stimuler votre ardeur et votre foi, redonner une nouvelle jeunesse à cette noble entreprise qui réunit les forces vives pastorales de votre pays. Que les enfants, c’est-à-dire l’Eglise de demain, en soient les premiers bénéficiaires! De tout cœur, au nom du Christ, Nous les accueillons dans cette famille où leur vie de foi, d’espérance et de charité demeure pour tous, comme sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus nous le rappelle, une invitation et un exemple. Et vous, chers congressistes, Nous vous bénissons ainsi que votre apostolat au service des enfants.

Du Vatican le 14 avril 1971.

PAULUS PP. VI

 



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