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Voyage Apostolique à Malte (25 - 27 mai 1990)

Discours au Président de la République de MALTE,
S.E.M. Censu TABONE*

25 mai 1990

 

Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, Honorables membres du Gouvernement, du Parlement et de la Justice Membres distingués du Corps diplomatique, Mesdames et Messieurs,

1. Je suis très heureux d’avoir l’occasion de m’adresser à vous, au début de ma visite pastorale à Malte. En tant que premier Pape à poser le pied sur ces îles, je suis conscient de la signification qu’a ma visite non seulement pour les membres de l’Église catholique mais pour la nation maltaise tout entière. À l’aube de l’ère chrétienne, vos ancêtres ont reçu l’Évangile de Jésus-Christ grâce à la prédication de l’apôtre Paul, en route pour Rome. Dans les siècles qui ont suivi, la foi enseignée et professée en communion avec le successeur de Pierre a pris de solides racines dans la vie et dans la culture du peuple maltais. J’espère que la présence de l’Évêque de Rome parmi vous sera un rappel de la contribution unique et durable que la foi chrétienne a apportée et continue d’apporter, en façonnant votre identité de nation et en favorisant sa croissance.

Je vous remercie de tout cœur, monsieur le Président, pour vos aimables paroles de bienvenue et pour avoir favorisé la réalisation de cette visite. Je saisis cette occasion pour rendre hommage à la foi du peuple maltais et pour proclamer l’Évangile et célébrer l’Eucharistie en communion avec les Pasteurs des diocèses de Malte et de Gozo. Durant ma visite, je souhaite apporter mes encouragements et mon aide à tous ceux qui, au milieu des défis et des circonstances présentes, demeurent fidèles à l’héritage impressionnant des valeurs chrétiennes que votre nation a reçu des générations passées et qui demeure le meilleur gage de son développement à l’avenir. Dépositaires d’une ancienne tradition de foi, les catholiques maltais doivent de plus en plus, à la veille du troisième millénaire chrétien, approfondir leur connaissance de cette tradition, en utilisant sa sagesse et son contenu pour bâtir une société moderne digne en tous points de cette noble terre.

2. A notre époque, il existe un consensus grandissant pour que la vie sociale et politique des nations soit fondée sur l’absolu respect de la dignité inaliénable et des droits de chaque être humain, indépendamment de la race, de la religion, des croyances ou des opinions politiques. Durant les deux guerres mondiales, aussi bien que dans les grands changements qui interviennent actuellement en Europe centrale et en Europe de l’Est, nous avons vu des peuples entiers rejeter les structures de pouvoir qui les leur refusaient dans les faits, trompant leurs légitimes aspirations à vivre dans un ordre social fondé sur la liberté, la justice et la paix. Comme vous le savez bien, la tache d’établir un tel ordre social demande une grande patience, une vision claire et une maturité morale. Par-dessus tout, elle exige de chaque individu et de chaque groupe social, un engagement ferme en faveur du bien commun. Elle demande également une nette volonté d’encourager un dialogue respectueux entre tous les secteurs de la vie nationale, en favorisant des lois et des politiques qui sauvegardent la liberté et la dignité de chaque citoyen, avec un souci particulier des pauvres et des plus vulnérables, du droit des familles et de ceux des travailleurs. En fin de compte, un engagement de la nation envers ces valeurs se vérifiera dans une large participation au processus démocratique, l’administration loyale de la justice et le développement d’un fort sentiment de solidarité sociale.

J’ai confiance que ces valeurs continueront d’inspirer le développement futur de votre pays. De même je fais confiance aux leaders de la nation législateurs. responsables publics, membres de la magistrature et hommes politiques aussi bien qu’aux groupes privés et qu’à chaque citoyen, pour veiller à ce que ces principes ne soient jamais sacrifiés aux tendances qui peuvent naître de l’influence d’idées ou de modèles de comportement étrangers à la tradition chrétienne de Malte.

3. Ayant toujours pris une part active à la vie de la nation, l’Église catholique désire offrir sa propre contribution au progrès du peuple maltais. A partir de son expérience séculaire d’assistance aux personnes comme à la société, l’Église à Malte est profondément consciente de son obligation d’interpréter les signes des temps à la lumière de l’Évangile et de répondre aux occasions et aux défis du jour présent d’une façon correspondant à sa mission religieuse. Ainsi que les évêques du Concile Vatican II ont eu l’occasion de le souligner, l’Église n’est motivée par aucune ambition terrestre (cf Gaudium et spes, 31), et «n’a pas le désir de s’impliquer dans le gouvernement de l’ordre temporel» (Ad gentes, 12).

Au lieu de cela, elle s’est engagée à poursuivre le travail du Christ en travaillant avec foi au salut de tout le genre humain et de chaque individu, «pris dans son entier, corps et âme, cœur et conscience, intelligence et volonté» (Gaudium et spes, 3)

Portant témoignage de l’amour de Jésus-Christ, l’Église s’efforce d’unir tous les hommes de bonne volonté dans un esprit de respect mutuel et de solidarité effective (ibid.). Dans son ministère, «elle guérit et élève la dignité de la personne humaine..., elle consolide la société et dote l’activité quotidienne des hommes d’une signification plus profonde» (op. cit., 40). Précisément, en étant fidèle à son identité et à sa mission propre, l’Église est convaincue qu’elle «peut contribuer grandement à humaniser la famille humaine et son histoire par chacun de ses membres et par la communauté comme un tout» (ibid.).

En conséquence, c’est l’intérêt de chacun que l’Église en premier lieu et que tous ceux qui sont sincèrement concernés par le bien des personnes et de la société s’efforcent de préserver l’autonomie d’action de l’Église. Il est important que l’Église jouisse de la liberté dans les sphères institutionnelles et administratives et qu’elle soit libre de toute pression indue, d’obstacles et de manipulation. En un mot, il est essentiel que l’Église soit capable d’agir effectivement pour remplir sa mission pour tous, en montrant ce qu’elle est réellement la Mère de tous les baptisés (cf. Lumen gentium, 64) et, en un certain sens, de tout le genre humain. Selon les indications de Vatican II, l’Église, en solidarité avec toute la famille humaine, exprime son amour pour cette famille en entrant en dialogue avec elle pour tous les problèmes qui la touchent (cf. Gaudium et spes, 3).

A cet égard, je ne peux manquer de prendre acte des résultats positifs des négociations qui se poursuivent entre le gouvernement et le Saint-Siège, ce dernier agissant en étroite collaboration avec les évêques maltais. Jusqu’ici, ces négociations ont porté leurs fruits par des accords qui expriment et encouragent des valeurs qui sont une part essentielle du patrimoine historique, culturel et institutionnel, tout en permettant à l’Église de continuer d’offrir sa contribution à ce patrimoine, en pleine harmonie avec son caractère distinct et les exigences de sa loi universelle. J’ai confiance qu’en ces matières d’intérêt commun et en respectant les principes le plus élevés de la liberté, de la justice et de la démocratie, d’autres accords seront bientôt conclus.

4. A l’intérieur de la communauté internationale, Malte est largement respectée pour ses initiatives destinées à renforcer la compréhension, la coopération, la paix et le bien-être entre les peuples. Je suis heureux de dire aussi que le Saint-Siège apprécie ces initiatives.

La présence parmi nous de nombreux diplomates accrédités auprès de la République de Malte, reflète la haute estime dans laquelle votre nation est tenue au sein de la communauté internationale. En les remerciant de leur sympathique présence, à la fois lors de mon arrivée et à cette cérémonie, je leur demande de transmettre à leur chef d’État respectif à leur gouvernement et à leur peuple mon salut chaleureux et mes vœux les meilleurs. Distingués membres du Corps diplomatique: j’ai l’espoir fervent que vos efforts pour favoriser des relations harmonieuses et mutuellement bénéfiques entre vos nations et la République de Malte, apporteront une contribution durable à la sécurité et au progrès à la fois de la zone méditerranéenne et du monde entier.

Mesdames et messieurs : je vous suis profondément reconnaissant de la gentillesse et de l’hospitalité avec lesquelles vous m’avez accueilli. En poursuivant ma visite pastorale, j’invoque cordialement sur vous et sur le peuple bien-aimé de Malte, les abondantes bénédictions de Dieu Tout-Puissant.


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.23 p.5.

La Documentation catholique n.2009 pp. 635-636.

 

 



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