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DISCOURS DU SAINT-PÈRE JEAN-PAUL II
AUX PARTICIPANTS À UNE RENCONTRE ŒCUMÉNIQUE
ITALO-ROUMAINE SUR LA DOCTRINE SOCIALE

Samedi, 24 octobre 1992

 

Excellences, Frères bien-aimés dans le Seigneur,

1. C’est avec des sentiments de grande reconnaissance que je vous accueille ce matin, évêques et théologiens roumains, au terme de votre rencontre italo-roumaine sur la doctrine sociale de l’Église. J’apprécie votre désir de conclure vos journées communes par un pèlerinage à la tombe des Apôtres Pierre et Paul, dans la ville de Rome, référence naturelle de votre langue et de votre culture roumaines. Je vous souhaite la bienvenue avec des sentiments chaleureux de fraternité dans le Christ et par le baiser de paix.

2. Comme vous venez de le dire, vous avez consacré une semaine à la réflexion avec des membres de l’épiscopat de Toscane, grâce à une initiative du diocèse de Prato que je tiens à remercier en la personne de Monseigneur Fiordelli, évêque émérite.

Conduisant une recherche constructive, vous avez étudié ensemble les lignes de force de l’encyclique «Centesimus Annus», que j’ai publiée pour le centième anniversaire de la promulgation de la célèbre encyclique «Rerum Novarum» du Pape Léon XIII. J’ai cherché à analyser les raisons culturelles et spirituelles profondes des changements sociaux et politiques intervenus au cours de l’année 1989 dans les pays d’Europe centrale et orientale, et pas seulement en Europe. Il s’agissait de discerner des lignes de conduite, d’esquisser des suggestions et de contribuer ainsi à une nouvelle façon de vivre, en respectant en l’homme son exigence d’absolu et ses droits fondamentaux.

L’évolution de la situation invite à une réflexion rigoureuse sur l’engagement du chrétien dans la société. Si elle est menée conjointement, cette réflexion aide tous les chrétiens à voir plus clairement quelles sont leurs tâches spécifiques; elle peut jeter les bases d’une coopération active et d’un témoignage commun de foi et de vie.

Dans le domaine délicat et changeant de l’engagement social, à côté des autres services qu’elle peut rendre, l’Église est surtout appelée à réaliser sa mission propre «en prêchant la vérité sur la création du monde que Dieu a mise entre les mains des hommes pour la rendre féconde et la parfaire par leur travail, et en prêchant la vérité sur la rédemption par laquelle le Fils de Dieu a sauvé tous les hommes et, en même temps, les a unis les uns aux autres, les rendant responsables les uns des autres»[1].

3. Catholiques et orthodoxes, nous avons probablement des manières différentes d’aborder le problème de l’engagement du chrétien dans la société. Notre but est cependant le même; notre diversité rend la confrontation plus féconde, en vue de voies plus appropriées et de conclusions plus riches.

D’ailleurs, la tradition roumaine a toujours compté sur de magnifiques exemples d’hommes et de femmes qui, écoutant l’Évangile, se sont engagés dans le service du prochain et la solidarité envers les plus pauvres.

Dès ses débuts, l’Église de Roumanie, dans sa grande majorité, a été marquée par la riche et multiforme tradition byzantine. Celle-ci, avec sa créativité, a sa manière propre de transmettre le message évangélique dans la société d’aujourd’hui, en fonction des conditions nouvelles qui la caractérisent.

Votre délégation comprend des orthodoxes et des catholiques de rite byzantin ainsi que de rite latin. Ce fait témoigne, aux yeux du peuple roumain, de votre désir de répondre ensemble aux difficultés auxquelles, les uns et les autres, vous êtes affrontés dans la société. Il atteste également votre volonté de commencer à résoudre les problèmes qui se posent entre vos communautés. Cela est de bon augure.

4. Dans la Lettre que j’ai tenu à adresser le 31 mai 1991 aux Évêques catholiques du continent européen sur les relations entre catholiques et orthodoxes, j’ai signalé certaines conséquences pastorales découlant du fait que nos Églises ont entre elles de nombreux liens fraternels. Elles doivent toujours se respecter mutuellement, refuser «toute forme indue de prosélytisme, en évitant absolument, dans l’action pastorale, toute tentation de violence et toute espèce de pression»[2]. Les différends qui demeurent encore doivent être résolus dans le dialogue, pour que soit trouvée «une solution équitable et digne de la vocation chrétienne»[3]. Je disais aussi qu’il ne suffit évidemment pas d’éviter les erreurs, mais qu’il faut promouvoir de manière positive la vie commune dans un respect mutuel et concerté»[4].

Au cours des journées passées ensemble, vous avez vécu une riche expérience de prière, d’étude et de recherche, en vue de parvenir à une réponse unanime. Je m’en réjouis avec vous.

Je souhaite qu’un dialogue paisible et fructueux se développe entre l’Église orthodoxe et l’Église catholique en Roumanie, afin de résoudre les questions posées et encore ouvertes après un demi-siècle de persécutions tragiques contre les chrétiens. La foi chrétienne a pu survivre malgré de très graves restrictions et grâce au sang versé d’un grand nombre de martyrs. Le dialogue pourrait nous faire progresser vers la pleine unité que le Seigneur veut pour ses disciples[5].

Chers Frères, je vous remercie encore pour votre visite. Je vous demande de transmettre mon très cordial salut aux autorités de vos Églises. En particulier, je vous demande de saluer tout spécialement les membres du Saint-Synode de l’Église orthodoxe et son Patriarche, Sa Béatitude Theoctist.

Le Seigneur soit avec vous!


[1] Ioannis Pauli PP. II Centesimus Annus, 51.

[2] Ioannis Pauli PP. II Epistula ad Continentis Europae Episcopos respiciens rationes Catholicos inter et Orthodoxos, 5, die 31 maii 1991: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, XIV, 1 (1991) 1382.

[3] Ibid. 3: l.c., p. 1379.

[4] Ibid. 5: l.c., p. 1383.

[5] Cfr. Io. 17, 21.

 

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