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DISCOURS DU PAPE PIE XII
À L'ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE ET MINISTRE
PLÉNIPOTENTIAIRE DE ROUMANIE,
S.E. LE GÉNÉRAL DANIEL PAPP
*

Vendredi 1er août 1941

Monsieur le Ministre,

Les circonstances, dans lesquelles Votre Excellence a été appelée par son Auguste Souverain, Sa Majesté le Roi Michel 1er, à le représenter comme Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire auprès du Saint-Siège, sont d’une grandeur vraiment tragique.

Dans de telles conditions, et pour autant qu’elles le permettent, ce Siège Apostolique continue à exercer sa mission dans le monde, mission dont l’accomplissement demande une atmosphère qui rende possible à tous les peuples de venir à lui avec la ferme confiance d’y trouver compréhension et appui pour les vastes et nobles aspirations de l’humanité et de chaque membre de la grande famille des Nations.

Les sentiments et les intentions, avec lesquels vous inaugurez aujourd’hui vos hautes fonctions, vous honorent, Monsieur le Ministre, et honorent le Pays que vous représentez.

Au milieu des multiples préoccupations et espérances de l’heure présente, et bien qu’ensanglantée de nombreuses blessures, la Nation Roumaine n a pas oublié de rendre un conscient hommage aux valeurs spirituelles et religieuses, et d’accorder aux soins de les promouvoir cette importance et cette estime, qui donnent la mesure de la vraie sagesse d’Etat, et constituent le fondement essentiel de la sûre et stable prospérité des Gouvernants et du peuple.

C’est de la conviction que les forces religieuses sont indispensables pour édifier une vie saine de la Nation, et du désir de garantir dans tout le Royaume de Roumanie aux catholiques de tout rite les droits appartenant à leur Religion, qu’a tiré son origine le Concordat heureusement ratifié en 1929. Ce ne fut assurément pas la première fois que ce noble peuple entrait en rapport avec le Saint-Siège. En remontant dans l’histoire, nous voyons le Prince Latzcou, voïvode de Moldavie, députer des messagers au Pape Urbain V (cfr. Lettre de Urbain V à l’Archevêque de Prague et aux Evêques de Breslau et de Cracovie, du 24 juillet 1370 – Theiner, Vet. Mon. Hung. II, pag.99). . Mais surtout Notre Prédécesseur Sixte IV, rappelé en termes si élevés par Votre Excellence, encouragea Etienne le Grand dans sa lutte pour la défense commune contre l’ennemi alors ultra-puissant de la chrétienté. Vainqueur à la grande bataille de Racova, ce vaillant Prince, qui attribua son triomphe uniquement à Dieu et jeûna quatre jours de suite au pain et à l’eau, envoya une partie des étendards, conquis par lui sur l’ennemi, en hommage au Pontife (cfr. Raynald. Ann. Eccles. T.X, a.1474, n.X-XI).

Ces rapports toutefois avaient été de nature transitoire. Le Concordat actuel a voulu au contraire créer des relations normales et complètes: il fut conclu, en effet, pour employer les paroles mêmes du Gouvernement Royal Roumain, «avec le ferme espoir que cet acte établira définitivement entre le Saint-Siège et la Roumanie des relations étroites et cordiales, pour le plus grand bien de la Roumanie et de l’Eglise Catholique».

Une telle espérance n’a pas été déçue. Les catholiques roumains ont usé des multiples possibilités que leur offrait le Concordat pour le plus grand bien de leur patrie. Les termes chaleureux avec lesquels vous avez rappelé, Monsieur le Ministre, le rôle important que l’Eglise Catholique loue dans la vie spirituelle de votre Nation, et l’assurance que votre Auguste Souverain donne une particulière attention à son libre développement viennent confirmer les bienfaisants effets du Concordat; il y a là en même temps pour Nous un témoignage très agréable que Nos soins pour favoriser des relations toujours plus confiantes entre ce Siège Apostolique et le Royaume de Roumanie, rencontrent de la part de l’Etat pleine correspondance et constante sollicitude.

C’est avec une émotion non moins intime que Nous avons entendu comment, au milieu de ses épreuves douloureuses comme de ses heureux succès, le peuple Roumain n’oublie pas les peines et les souffrances des autres peuples, et comment tous Nos efforts pour soulager les douleurs indicibles et chaque jour croissantes, causées par la guerre, trouvent chez lui un écho profond.

En formant à Notre tour pour Sa Majesté le Roi et pour Son Excellence le Conducator les vœux les plus sincères, et en vous assurant, Monsieur le Ministre, en ce solennel début de votre Mission, de Notre bienveillant appui, Nous implorons la bénédiction du Très-Haut sur votre Nation, afin que, dans la concorde des esprits et dans l’union de toutes les forces vives et saines du Pays, elle puisse marcher toujours plus vaillamment et sûrement vers un avenir de justice, de paix et de bonheur.


*AAS 33 (1941), p.359-360.

L’Osservatore Romano 2.8.1941, p.1. .

Discorsi e Radiomessaggi, III, p. 171-173.

Documents Pontificaux 1941, p.203-205.

Actes de S.S. Pie XII, vol. III, p.162-163.

 



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